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Le Rwanda souligne le 30ᵉ anniversaire du génocide des Tutsis

Un homme allume une flamme.

Le président rwandais, Paul Kagame, allume une flamme pour marquer le début de 100 jours de commémorations pour souligner le 30ᵉ anniversaire du génocide au Rwanda.

Photo : Getty Images / Luke Dray

Agence France-Presse

La communauté internationale « nous a tous laissé tomber » durant le génocide des Tutsis, a déclaré dimanche le président rwandais Paul Kagame à l'occasion des commémorations du 30ᵉ anniversaire des massacres dont l'ombre plane toujours sur ce pays de l'Afrique des Grands Lacs.

Les commémorations officielles ont commencé ce dimanche 7 avril, jour anniversaire des premières tueries de ce qui allait devenir le dernier génocide du 20ᵉ siècle, faisant 800 000 morts, majoritairement dans la minorité tutsie mais aussi parmi les Hutus modérés.

La communauté internationale avait été vivement critiquée pour son inaction avant et durant le génocide.

C'est la communauté internationale qui nous a tous laissé tomber, que ce soit par mépris ou par lâcheté, a déclaré Paul Kagame lors d'un discours donné devant plusieurs milliers de personnes au BK Arena, une salle polyvalente ultramoderne de la capitale, Kigali.

Un stade rempli.

Le stade de Kigali, la capitale du Rwanda, était rempli pour les cérémonies commémoratives du 30ᵉ anniversaire du génocide.

Photo : AFP / VIA GETTY IMAGES / GUILLEM SARTORIO

Personne, personne, pas même l'Union africaine [UA], ne saurait se disculper de son inaction face à la chronique d'un génocide annoncé. Ayons le courage de le reconnaître et de l'assumer, a également reconnu le président de la Commission de l'UA, Moussa Faki Mahamat.

Le président Paul Kagame – qui dirige d'une main de fer le pays depuis la fin du génocide – s'est recueilli dans la matinée, aux côtés de dignitaires étrangers, devant une gerbe de fleurs et a allumé une flamme du souvenir au Mémorial de Gisozi.

En fin de journée, des milliers de personnes ont participé à une veillée nocturne au BK Arena, qui compte 10 000 places, des bougies à la main.

Plusieurs jeunes assis tiennent une bougie dans leur main.

Des milliers de personnes se sont rassemblées à Kigali dimanche en soirée afin de participer à une veillée nocturne.

Photo : Getty Images / Luke Dray

Aujourd'hui, c'est une mauvaise journée pour tous les Rwandais, lâche doucement Ernestine Mukambarushimana, 30 ans. Mais cette cérémonie lui fait du bien, dit-elle. Je ne me sens pas seule.

Dans l'assistance, Ange Christian Kwizera avait sept ans quand des miliciens hutus ont tué ses parents dans la paroisse de Mibilizi (sud-ouest). Il est devenu professeur d'histoire pour aider à faire en sorte qu'il n'y ait plus jamais de génocide.

La communauté internationale présente

L'ancien président américain Bill Clinton, en poste à la Maison-Blanche durant les massacres, l'ancien président français Nicolas Sarkozy, le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, et le secrétaire d'État français à la Mer, Hervé Berville, né au Rwanda, ont assisté plus tôt à la cérémonie.

Trois personnes se recueillent devant des gerbes de fleurs.

Différentes personnalités politiques se sont déplacées au Rwanda pour souligner le 30ᵉ anniversaire du génocide, notamment l'ex-première dame de l'Afrique du Sud, Graca Machel, l'ancien président américain Bill Clinton ainsi que le président du Soudan du Sud, Salva Kiir.

Photo : AFP / VIA GETTY IMAGES / LUIS TATO

À l'occasion de cet anniversaire, le président français Emmanuel Macron a affirmé dans une vidéo diffusée dimanche que la France assume tout et exactement cela dans les termes que j'ai employés le 27 mai 2021. En déplacement à Kigali, il avait alors dit être venu « reconnaître » les « responsabilités » de la France.

Paris, qui entretenait des relations étroites avec le régime hutu quand le génocide a commencé, a longtemps été accusé de complicité par Kigali.

Nous avons, tous, abandonné des centaines de milliers de victimes à cet infernal huis clos, avait-il ajouté, précisant que Paris n'avait pas été complice des génocidaires hutus. M. Macron n'avait pas présenté d'excuses tout en disant espérer le pardon des rescapés.

Je n'ai aucun mot à ajouter, aucun mot à retrancher de ce que je vous ai dit ce jour-là.

Une citation de Emmanuel Macron, président de la France

Jeudi, l'Élysée avait rapporté que, selon Emmanuel Macron, la France aurait pu arrêter le génocide de 1994 au Rwanda avec ses alliés occidentaux et africains mais n'en a pas eu la volonté, des mots que le chef de l'État n'a pas prononcés dimanche.

Après des décennies de tensions qui sont allées jusqu'à une rupture des relations diplomatiques entre Paris et Kigali de 2006 à 2009, un rapprochement a été permis entre les deux pays à l'issue de la création d'une commission par Emmanuel Macron, qui a conclu en 2021 à des responsabilités lourdes et accablantes de la France.

Le président américain Joe Biden a quant à lui déclaré que les répercussions des massacres se font encore sentir au Rwanda et dans le monde entier.

Nous n'oublierons jamais les horreurs de ces 100 journées.

Une citation de Joe Biden, président américain

Et au Canada?

Le premier ministre canadien Justin Trudeau a diffusé dimanche une déclaration officielle afin de commémorer une des tragédies les plus meurtrières de l'histoire.

À tous les survivants qui ont choisi le Canada comme terre d’accueil, sachez que nous serons toujours à vos côtés, et tout particulièrement pendant cette douloureuse période de commémoration, a-t-il souligné.

Le premier ministre Trudeau a également salué le processus de réconciliation dans lequel s'est engagé le peuple du Rwanda tout en rendant hommage à la force de maintien de la paix des Nations Unies à laquelle participaient quelques Canadiens et qui était dirigée par le major général Roméo Dallaire.

Ce dernier a d'ailleurs diffusé un message en anglais sur les réseaux sociaux ces derniers jours, appelant le monde à s'inspirer du Rwanda.

Les trente dernières années au Rwanda ont constitué l'exemple le plus profond de pacification noble et courageuse dont j'ai été témoin, peut-être même qui n'a jamais existé, a écrit M. Dallaire.

Au Rwanda, pendant sept jours, la musique ne sera pas autorisée dans les lieux publics ni à la radio. Rencontres sportives et films seront interdits de diffusion à la télévision, sauf s'ils sont liés aux commémorations.

Retour sur une tragédie

Les tueries du printemps 1994 ont été déclenchées au lendemain de l'attentat contre l'avion du président hutu Juvénal Habyarimana, dans une frénésie de haine alimentée par une virulente propagande antitutsie.

Trois mois durant, l'armée, les milices interahamwe (bras armé du régime génocidaire hutu) ainsi que de simples citoyens ont massacré, avec fusils, machettes ou gourdins, les Tutsis, appelés par leurs bourreaux inyenzi (cafards en langue kinyarwanda), ainsi que des opposants hutus.

À côté d'une voiture militaire, un soldat armé est debout à côté d'un enfant qui tient ses mains sur sa tête.

Un militaire belge en mission onusienne à Kigali le 13 avril 1994 (Photo d'archives)

Photo : Associated Press / Jean-Marc Bouju

Le carnage a pris fin lorsque la rébellion tutsie du FPR s'est emparée de Kigali, le 4 juillet, déclenchant un exode de centaines de milliers de Hutus vers le Zaïre voisin (aujourd'hui République démocratique du Congo).

Trente ans plus tard, des charniers continuent d'être mis au jour.

Réconciliation difficile

Depuis 30 ans, le Rwanda mène un travail de réconciliation, notamment avec la création, en 2002, de tribunaux communautaires, les gacaca, où les victimes pouvaient entendre les aveux des bourreaux.

La justice a également joué un rôle majeur, mais, selon Kigali, des centaines de personnes suspectées d'avoir participé au génocide sont toujours en liberté, spécialement dans les pays voisins, comme la République démocratique du Congo et l'Ouganda.

Une série de photos accrochées.

Des photos de victimes au mémorial du génocide, à Kigali, au Rwanda. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Janic Tremblay

Au total, 28 fugitifs ont été extradés de pays étrangers, dont six des États-Unis. La France n'en a extradé aucun mais en a condamné une demi-douzaine.

Des organisations de défense des droits de la personne, dont Amnistie internationale et Human Rights Watch, ont appelé à l'accélération des poursuites contre les responsables du génocide.

Le haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Volker Türk, a de son côté exhorté les États du monde entier à redoubler d'efforts pour traduire en justice tous les auteurs présumés encore en vie.

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